Digne de mention
Fiers d'être Québécois ! ?Certains de nos compatriotes s'étonnent que la ville de Québec ait fait venir des États-unis un grand psychanalyste français pour qu'il redéfinisse l'identité de notre capitale nationale. Pourtant, le geste du maire Labeaume - avec un chèque de 300 000$ entre le pouce et l'index - est parfaitement normal et tout à fait dans l'ordre des choses.
Quand on sait les humiliations en série qu'a subies notre bon peuple canadien-français depuis la défaite des Plaines d'Abraham; quand on invente l'Acte d'Union pour nous obliger à payer les dettes des Ontariens anglophones; quand on nous impose la Confédération pour rogner notre pouvoir politique; quand on se fait piquer notre hymne national et jusqu'à notre date de naissance; quand on perd deux référendums dont le dernier nous a été, carrément, volé; quand la Cour suprême s'acharne à déchirer, morceau par morceau, notre Loi 101; quand nos Trudeau et Chrétien travaillent sans relâche à saper dans nos esprits notre désir d'indépendance; quand on vit l'humiliation de Meech; quand on assiste sans broncher au rapatriement unilatéral de la Constitution qui nous a pratiquement mis à la porte du Canada; quand on subit le scandale des commandites; quand notre Jean Charest dirige notre Assemblée nationale par le vote des anglophones et des néo-Québécois, n'ayant besoin que de 15% de nos votes à nous; quand notre taux de natalité se tarit à une vitesse record; quand les jeunes décrochent en masse de nos écoles; quand ils se suicident plus que partout au monde; quand l'Université Laval de la capitale nationale, la première université francophone en Amérique du nord, se croit obligée de donner des cours en anglais pour tenter de réduire l'écart scandaleux, qui ne bouge pas depuis presqu'un demi-siècle, entre nos diplômés et les diplômès anglophones de notre belle province; quand nos médias rivalisent de complaisance pour couronner nos têtes heureuses qui se lèvent de partout, faisant ainsi la preuve qu'en l'absence de succès nationaux, les individus qui se vedettarisent se bousculent au portillon; quand on applaudit, debout dans l'euphorie, une bande d'humoristes vulgaires qui n'en finissent plus de maganer notre langue; quand on quitte tranquillement, en bombant le torse, la religion de nos aïeux, à défaut de rompre dangereusement avec nos maîtres anglophones; en toute tranquilité, disons-nous, sachant pertinemment que les curés et les bonnes soeurs n'ont pas de fusils sous leurs froques et n'ont pas le pouvoir des «mesures de guerre».
Quand on fait et se laisse faire ces choses-là, il est normal et parfaitement logique que nous offrions une fortune à une star américaine de la psychanalyse française pour qu'elle ait la bonté de nous ausculter, au coeur même de notre nation, dans le but de découvrir, une bonne fois pour toutes, qui nous sommes, nous, qui sommes passés, en vain, de Canadiens à Canadiens-français-catholiques à Québécois à Québécois francophones.
Paul Warren, Québec
Fiers d'être Québécois ! ?, Paul Warren, 21 février 2010