J'aime bien ManuMilitari; l'opinion de David est exactement celle du concensus médiatique, du moins des médias que les états-uniens catégorisent 'liberals', ce qui m'évite de pousser des sujets qui ne m'intéressent pas: ce type abbat un boulot considérable. Prenez le brouhaha concerté autour du résultat des élections en Palestine. Un groupe de résistants à l'occupation (illégale) passe au politique. Pensez Sinn Féin. Mais ici le Hamas raffle la mise.George Bush: "[...] If the greater Middle East joins the democratic revolution that has reached much of the world, the lives of millions in that region will be bettered, and a trend of conflict and fear will be ended at its source."
Désireux de passer de la théorie à la pratique, les États-Unis ont forcé le jeu pour provoquer des élections en Égypte, Irak et Palestine. Le résultat ?
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mais il ne suffit pas de faire voter les gens pour mettre en place un processus qui favorise la paix, la stabilité et l’émancipation des gens. Il faut avant toute chose développer une tradition et un contexte qui rendent possible l’enracinement de ces valeurs.
Be careful for what you wish…
On consultera les sources journalistiques qu'il cite pour évaluer le concensus sur les élections palestiniennes, elles sont toutes également pertinentes, David ratisse large. Un des axiomes du Concensus (ce n'est pas particulier au cas palestinien) est bien exprimé par David, dans les mots de The Guardian: "All this does not mean that the dreams that the Bush administration has for the region are coming true." Je l'ai déja répété pour contraster un autre billet de ManuMilitari, je récidive (le recyclage c'est écolo), avec Rationaliste 1er:
The interesting fact is that it was presupposed uncritically across the spectrum that the messianic vision must be the goal of the invasion, not this silly business about WMD and al-Qaeda, no longer credible to elite opinion. What is the evidence that the US and Britain are guided by the messianic vision? There is indeed evidence, a single piece of evidence: our Leaders proclaimed it. What more could be needed?
Imperial Presidency, Noam Chomsky, janvier 2005
Mais laisser passer le tout aussi concensuel "une tradition et un contexte qui rendent possible l’enracinement de ces valeurs" sans contraste Chomskyien, ça serait pas vraiment al-Shifa, non?
The right wing in Israel is undoubtedly trying to destroy the possibility of a meaningful two-state settlement by such methods. More specifically, I presume that the purpose of murdering Sheikh Yassin, destroying Rafah, and other similar measures is to ensure that after a likely Israeli partial withdrawal, the Gaza Strip will be so utterly demolished that the population caged within it will rot and die and turn on each other in desperation, at which point Western humanists can comment sagely on the inability of Palestinians (like Haitians, and other targets of our benevolence) to manage their own affairs even when given a chance. Therefore we must (reluctantly) support Israel's "defensive" moves to take over the valuable land and resources of the West Bank while leaving the remaining population caged in a dungeon there.
Justice for Palestine? Q & A on prospects for a solution, Noam Chomsky, Justin Podur-Stephen Shalom, 30 mars 2004
Analyser, c'est bien, mais faut aussi acquérir des connaissances, alors voilà, du Monde Diplomatique:
Les électeurs ont voté pour le Hamas non pas parce qu’ils adhéreraient à son programme « historique » d’élimination de l’Etat d’Israël, non parce qu’ils souhaiteraient une relance des attentats-kamikazes (les récentes enquêtes d’opinion montrent au contraire une volonté de paix et de négociation), mais parce qu’ils veulent en finir avec la gestion catastrophique de l’Autorité palestinienne. On peut espérer d’ailleurs que le tremblement de terre du 25 janvier suscitera une recomposition de la vie politique palestinienne permettant une stratégie plus efficace contre l’occupation.
Quelques remarques sur le Hamas lui-même sont aussi indispensables. Cette organisation est incontestablement populaire, implantée en Cisjordanie et à Gaza. Elle fait partie du paysage politique. Comme dans beaucoup d’autres pays arabes, il est illusoire de penser pouvoir avancer vers la démocratie en excluant les islamistes. Le Hamas dispose de trois atouts majeurs auprès de la population : sa participation à la résistance à l’occupation ; son réseau d’aide sociale ; le dévouement incontestable de ses cadres. Mais l’exercice du pouvoir sera un défi redoutable. Rappelons, par ailleurs, que, sur le plan économique, le Hamas se situe plutôt à droite de l’échiquier, favorable au libéralisme ; et sur le plan des mœurs, il est extrêmement conservateur, ce qui suscite de l’inquiétude, notamment chez une partie des femmes.
Le Hamas est aussi une organisation qui sait être pragmatique : ainsi, il avait refusé de participer aux précédentes élections de 1996, sous prétexte qu’elles se déroulaient dans le cadre des accords d’Oslo ; il a désormais modifié sa position, alors que les conditions n’ont pas changé. Il a aussi su nouer des alliances avec des notables locaux très respectés, accepter des chrétiens sur ses listes, gérer avec compétence les municipalités qu’il a conquises, etc.
Il est difficile de savoir ce qui va se passer dans les mois à venir. Pourtant, si la France a un rôle à jouer, c’est de rappeler que toute solution du conflit passe par l’application des résolutions de l’ONU : retrait total d’Israël de tous les territoires occupés en 1967, y compris Jérusalem-Est ; création d’un Etat palestinien indépendant ; droit d’Israël à la paix et à la sécurité. Affirmer vouloir obtenir du Hamas qu’il reconnaisse l’Etat d’Israël, conformément au droit international, sans répéter dans le même temps que l’impasse actuelle réside dans le refus permanent de cet Etat de mettre en œuvre les résolutions de l’ONU, ne ferait que confirmer que Paris renonce à tout rôle indépendant au Proche-Orient.
Sur la victoire du Hamas, Alain Gresh, 27 janvier 2006
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